Se dire je vais bien
Olivia Walters
Me voilà au clavier. Cela fait combien de temps, un peu plus d’un mois. Je reconnais que j’ai du mal à m’exprimer. Les phrases ne déroulent pas comme d’habitude. Alors en arrivant à un tel moment, on cherche la raison pour laquelle on se trouvait incertain, désespéré, voire malheureux. Drôle, n’est-pas, qu’on n’évoque rarement celle à qui les pensées reviennent. La figure de notre existence enfantine.
Je voudrais accueillir mon invité du jour, maman, jusqu’à présent jamais abordée dans mes textes.
Le poids qui s’empare de ma poitrine fait que je n’arrive guère à respirer. C’est là que j’aperçois du problème. Les impasses à la langue. Elle hurle, elle maudit, elle a la peau rouge en parlant l’un à l’autre.
Peut-être je comprends mieux ce qu’Edouard Louis et qu’Ocean Vuong veulent dire dans leurs romans imprégnés d’injures familiales. Et si le langage ne suffisait pas ? Si on s’éloigne afin de mieux se connaître ? Donc à l’occasion de la tonalité résolu de cette paragraphe, voici les pépites de motivation qu’on s’attend. Fais de ton mieux, ces états d’esprit passeront à la reconnaissance de soi-même. Ne sois pas comme ça, regarde-toi, comment il faut avoir de la gratitude parce que tout s’est bien passé pour toi.
Pourtant je me complais dans mon malheur, mon angoisse redoutable… voir ces mots tapés sur l’ordinateur et soudainement je me suis faite noyée dans un engrenage de conversations noires. Tu n’es pas lesbienne, toi on dirait une salope la façon dont tu rencontres des hommes, arrête de te mettre sur la défense quand je te parle. Vas-y, raccroche et va prendre ton Klonopin. Va te faire foutre !
Finalement la petite voix en moi s’affirme de se contenter d’un avis inachevé. La voix de ma mère se transmet à mon inconscient et j’essaie avec toutes mes tripes à lutter contrer cet idée. ■
Photo credits// Painting by Robert Michael Fiacco “Tears of Sadness”